Si
Casio a inventé la calculatrice graphique avec la
fx-7000G pour la rentrée 1985,
Hewlett Packard est pour sa part rentré dans l'aventure pour la rentrée 1987 avec la
HP 28C.
La
HP 28C était également elle aussi une double innovation :
- première calculatrice graphique avec un moteur de calcul littéral
- et également première calculatrice multimédia
En effet pour ce dernier point, en plus des affichages texte et graphiques, la
HP 28C disposait d'un
buzzer piézo-électrique.
Cette capacité remarquable a été reprise dans la plupart des modèles graphiques
Hewlett Packard, devenant une vériable signature de la marque :
- pour l'entrée de gamme numérique les HP 39G (2000), HP 39g+ (2003), HP 39gs (2006)
- pour l'entrée de gamme formel les HP 40G (2000), HP 40gs (2006)
- pour le milieu de gamme formel les HP 48S (1991), HP 48G (1993), HP 48G+ (1998), HP 48gII (2003)
- pour le haut de gamme formel les HP 48SX (1990), HP 48GX (1993), HP 49G (1999), HP 49g+ (2003) et HP 50g (2006)
Elle ne fut abandonnée que fort récemment avec les derniers modèles
HP 39gII (2011) et
HP Prime (2013)[/list]
Même si un
buzzer piézo-électrique ne permet pas de reproduire le même éventail de sons qu'un haut-parleur, cela n'a pas empêché la communauté
HP de se pencher dessus dès les
HP 48 au début des années 1990, et d'avoir des jeux avec effets sonores ou même convertisseurs de fichiers audio !
(clic sur la vidéo ci-contre pour avoir le son)Mais face à cette avancée formidable, où sont donc les TI et Casio multimédia similaires ?...
Chez
Texas Instruments, une calculatrice graphique multimédia a effectivement existé mais de façon très éphémère.
On peut citer le prototype
PLT-SU1 de 2003, testé justement là-dessus dans une
actualité précédente. Mais hélas, à peine sorti et présenté que ce prototype fut abandonné en faveur du projet
TI-Nspire, et aucun modèle dérivé ne fut donc jamais commercialisé.
Passons chez
Casio, et plantons d'abord le décor. Rentrée 1995,
Texas Instruments sortait sa légendaire
TI-92, un modèle révolutionnaire proposant entre autres des capacités de calcul formel grâce à l'intégration d'un portage du moteur de calcul du logiciel
Derive.
Casio bien évidemment ne pouvait pas rester sans réagir et met en place dès 1996 le projet
CAS, visant à concevoir également des calculatrices graphiques formelles, avec une consultation des enseignants dans le monde entier.
Rentrée 1997 après seulement 1 an de travail et juste 2 ans de retard sur
Texas Instruments,
Casio sort sa première
Casio formelle, la
cfx-9970G à l'international, plus connue en France sous les noms de
cfx-9990GT puis
Graph 80.
Si le pari logiciel était réussi, le matériel était hautement complexe clairement pas optimisé niveau coût de fabrication. Tout était en double puisqu'il s'agissait en effet également de la première calculatrice graphique biprocesseur au monde, chaque processeur ayant en prime sa paire de puces
RAM-ROM dédiées.
Notre hypothèse serait que
Casio avait obtenu les droits d'utilisation d'un moteur de calcul formel, mais n'avait pas pu le recompiler ou le réassembler pour son processeur habituel
(à l'époque un 16 bits HCD62121 de chez Toshiba), soit parce que la licence d'utilisation n'incluait pas l'accès au code source, soit parce que cela soulevait des difficultés techniques.
Il y a donc le processeur qui fait tourner le logiciel habituel avec l'interface graphique caractéristique des calculatrices graphiques
Casio, et le processeur qui s'occupe spécifiquement de répondre aux requêtes de calcul formel lorsque l'on ouvre l'application dédiée.
Nous ne sommes pas certains que les ventes de ces modèles aient réellement enrichi
Casio, mais c'était le prix à payer pour ne pas perdre la face devant
Texas Instruments. Vu l'état des choses, attendre d'avoir un matériel optimisé aurait impliqué de repousser la sortie au moins à la rentrée suivante, ce qui aurait donné plus d'une scolarité complète au lycée sans réponse face à la
TI-92.
Rentrée 1999, suite du projet
CAS,
Casio récidive avec les
Algebra FX2.0, plus connues en France sous les noms de
Graph 100.
Tout nouveau matériel avec le processeur 16 bits
Nec V30Mx, un clone du processeur
Intel 80186 qui cette fois-ci faisait tourner à lui tout seul :
- le système d'exploitation ROM-DOS, un dérivée par Datalight du système d'exploitation MS-DOS 2.0
- l'interface graphique habituelle des calculatrices Casio
- et le coeur de calcul formel, développé par Saltire Software
Un matériel ici encore très curieux. Là où les autres modèles de la même époque utilisaient le même processeur et la même carte électronique avec juste quelques variations de l'entrée au haut de gamme
(écran couleur ou monochrome, plus ou moins de mémoire RAM), le matériel des
Algebra FX2.0 et
Graph 100 était fort surprenant...
Casio a pourtant pour habitude de minimiser les coûts en réutilisant le même matériel
(et donc tout ou partie des briques logicielles) pour différents produits, n'ayant alors donc à investir dans le développement qu'une seule fois, et cette pratique va bien au-delà du domaine des calculatrices. Par exemple nous t'avons
annoncé récemment que les calculatrices graphiques monochromes de nos jours étaient matériellement très similaires aux dictionnaires électroniques
Casio, partageant avec eux le même processeur ainsi qu'une carte électronique d'architecture très similaire !
Mais ce n'était pas une anomalie en réalité, car nous savons aujourd'hui que le processeur
Nec V30Mx ne sortait pas de nulle part, étant déjà utilisé à l'époque pour la série d'assistants personnels tactiles
Casio Pocket Viewer, dont dès 1999 les
PV-100 et
PV-200.
Si la carte électronique restait différente, cela a sans doute malgré tout pu permettre des économies par mutualisation de l'approvisionnement et/ou du développement logiciel.
Mais le projet
CAS continue. En 2002,
Casio présente un prototype d'un tout nouveau modèle formel.
Certains l'appellent ClassPad 200, même si nous n'avons jusqu'à ce jour jamais pu confirmer cette dénomination, par absence de visuels ou d'autres sources.
Et rentrée 2003 sort la version finalisée, la
ClassPad 300, l'aboutissement de 7 ans d'investissements de
Casio dans le projet
CAS.
Un changement majeur par rapport à l'ensemble des modèles précédents est que la
ClassPad 300 est une calculatrice tactile, son écran format
smartphone se contrôlant avec un stylet, le clavier étant quant à lui fortement réduit avec seulement 31 à 34 touches selon comment on compte
(le pavé directionnel regroupant 4 touches en une seule).
Précisons juste que ce n'est pas
Casio qui a inventé la calculatrice graphique tactile, mais
Sharp avec la
EL-9600 dès la rentrée 1997.
Bref, ceci étant dit, revenons à nos
Casio. En conséquence, nous avons une interface graphique totalement différente de celles des modèles précédents, conçue également par
Saltire Software.
Mais ce qui nous intéresse aujourd'hui, c'est le matériel...
Avec la
ClassPad 300 de 2003 donc, changement de processeur pour un 32 bits
SH3 de chez
Renesas.
Le
SH3 va rapidement devenir le processeur de référence pour l'ensemble des calculatrices graphiques
Casio, une migration qui s'effectue sur plusieurs années progressivement du haut de gamme jusqu'à l'entrée de gamme :
- rentrée 2003 donc : haut de gamme avec la ClassPad 300
- rentrée 2005 : milieu de gamme haut avec les fx-9860G et Graph 85
- rentrée 2009 : milieu de gamme bas avec les fx-9750GII et Graph 35+USB
- rentrée 2010 : entrée de gamme avec les fx-7400GII et Graph 25+Pro
Si la mutualisation de l'approvisionnement vint donc par la suite, on peut toutefois se demander d'où pouvait bien sortir ce processeur SH3 en 2003...
Et une fois encore il nous faut regarder du côté des assistants personnels de
Casio. En 2003, la série des
Pocket Viewer migrait elle aussi vers le processeur
SH3 avec le nouveau
PV-S1600.
La similarité avec la
ClassPad 300 va même bien au-delà de la simple utilisation du même processeur. Le matériel et l'architecture logicielle sont extrêment similaires, si bien que les applications additionnelles compilées pour la
PV-S1600 peuvent être installées et lancées sur
ClassPad 300 sans la moindre recompilation ; juste à corriger des informations dans l'en-tête du fichier comme nous te l'avions
déjà annoncé.
La
PV-S1600 incluait même un
buzzer piézo-électrique et les applications additionnelles compilées pouvaient l'utiliser pour divers effets sonores, notamment dans les jeux.
Et nous en arrivons à un aspect hélas fort méconnu de la remarquable
ClassPad 300, elle utilise une carte électronique très similaire incluant le même
buzzer !
Ce
buzzer est utilisé officiellement même si de façon bien anecdotique ; les mises à jour système nécessitant plusieurs minutes
Casio a eu l'idée de lui faire jouer une mini mélodie en fin de mise à jour juste avant le redémarrage.
Hélas, la communauté
Casio de l'époque ne s'est pas emparée de cette possibilité pourtant formidable comme l'avait démontré la communauté
HP.
Impossible de dire qu'aucune application additionnelle
ClassPad n'a utilisé le
buzzer vu que la plupart des sites ayant accompagné à l'époque les utilisateurs de calculatrices
ClassPad ont aujourd'hui hélas disparu. Si ça a existé, il faut croire que ce fut également anecdotique et pas très populaire, vu que ça a été oublié.
Il faut dire que
Casio n'a pas aidé, ne laissant pas à sa communauté
(et surtout ceux qui n'avaient pas connu les HP) le temps de se rendre compte du potentiel de la chose. Dès la rentrée 2005 la
ClassPad 300 était remplacée par la
ClassPad 300 Plus. Il s'agissait d'une révision matérielle majeure comme indiqué par le changement de référence de la carte électronique, passant de
GY430 à
GY432.
Au menu un écran bien mieux contrasté et donc lisible
(celui de la ClassPad 300 ayant le défaut d'être très sombre), mais également la suppression du
buzzer ainsi que de son circuit dédié, ne laissant donc même pas la possibilité de le rajouter facilement.